FATRASÍAS: Bataille y la Revolución Surrealista


Bataille colaboró una sola vez en la revista La Révolution surréaliste. No se trató de un artículo ni de un poema, ni siquiera del relato de un sueño, tal como era común entre los surrealistas, sino de una traducción. O mejor dicho: de una trascripción. Y más en concreto, de la versión moderna de una serie de Fatrasies, poemas del siglo XIII que presentan la peculiaridad de carecer de todo sentido. El encargo le llegó a Bataille por escrito a través de su amigo Michel Leiris, aunque no cabe duda de que procedía del mismísimo Breton. Estaba previsto que el resultado se publicase en el número del mes de octubre de 1925, pero no apareció hasta marzo del año siguiente. Mantenemos las Fatrasies en su forma original en francés –es decir, en aquella que le dio Bataille- por razones obvias.

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FATRASÍAS

La mayor parte de las fatrasías, poemas incoherentes compuestos en el siglo XIII, son anónimas. Sólo Philippe de Beaumanoir, célebre poeta y jurisconsulto, es conocido como autor de dos de ellas. Gran cantidad de poetas de la misma época debieron de escribir fatrasías que no se han conservado. Éstas, de las que aquí pueden leerse algunos extractos, escaparon al desprecio de las generaciones del mismo modo que se escaparon del cerebro de aquellos a los que una carcajada cegó un día.

1. ANONYME

Je sais le roman d’Hélène

De bout en bout.

J'ai une douleur à la tête

qui m'a tué aujourd'hui.

Tel croit veiller qui dort

au Paradis

Si tu pouvais être à Paris,

plut à Dieu !

Camarade, je te perds un jeu ?

pensons à lui

Il n'y a pas mis assez de sel ?

qui a fait ça ;

Où en est votre procès ;

Dites un peu voir.

Je sais bien que pour mieux valoir,

on doit aimer.

C'est à Marseille sur mer

qu'il sommeille.

Conseille-moi dans l'oreille :

Sont-ils bien peints ?

Je n'ai jamais entendu parler de robe brodée

qu'on m'aurait donnée.

J'aime autant trèfle qu'as

ou brignole.

Camarade j'ai été à l'école

toute mon enfance.

(Jubinal, NOUVEAU RECUEIL, Paris, 1842, 2 vol., in-8°, t. I, p. 177.)


Le son d'un cornet

Mangeait au vinaigre

le coeur d'un tonnerre

quand un béquet mort

prit au trébuchet

le cours d'une étoile

En l'air il y eut un grain de seigle

quand l’aboiement d'un brochet

et le tronçon d’une toile

ont trouvé foutu un pet,

ils lui ont coupé l’oreille

(NOUVEAURECUEIL, t. II, p. 214.)


Un ours emplumé

fit semer un blé

de Douvres à Oissent,

quand sur un éléphant rouge

vint un limaçon armé

qui leur criait :

Fils de putains, arrivez !

Je versifie en dormant.

(NOUVEAU RECUEIL, t. II, p. 228.)


2. PHILIPPE DE BEAUMANOIR.

Par nécessité, il me faut bouger

Dans la journée

Madame Aubrêe où est allée

Marion ?

Trois quarterons de beaux boutons

je vous vendrai

Simple et tranquille m'y guerroie beaucoup

votre amour.

Les arcs d'aube sont les meilleurs,

je le crois ainsi.

Par la foi que je vous dois, soixante trois

sont ceux de là-bas.

Celui-ci s'en retourna, car il n'osa

plus rester.

Je veux aller à Saint-Omer

de bon matin...

Apportez de bonne heure des aulx épluchés

dans ce mortier.

Allez plaider sans tarder,

il en est temps.

Les moines d’Oscans sont de braves gens ;

C’est ainsi que je pense.

Vois comme il fuit ! Allons tous

Courant après.

La par devant s'en va fuiant

un grand lapin..

Le Yolin boit tant de vin

qu'il se noie

Pour rien que je voie je ne dirai plus

de ces phrases oiseuses

(OEUVRES POÉTIQUES DE PHILIPPE DE RÉMI, SIRE DE BEAUMANOIR, Paris, 1885, 2 vol. in-8°, t. II, pp. 275-284.)


Je vis toute la mer

s'assembler sur terre

pour faire un tournoi

et des pois à piler

sur un chat monter

firent notre roi.

Là dessus vint je ne sais quoi

qui prit Calais et Saint-Omer

et les mit à la broche,

les faisant reculer

sur le mont Saint-Eloi.

Un grand hareng-saur

avait assiégé Gisors

de part et d'autre

et deux hommes morts

vinrent avec de grands efforts

portant une porte.

Sans une vieille bossue

qui alla criant : « A ! hors. »

le cri d'une caille morte

les aurait pris avec de grands efforts

sous ton-chapeau de feutre.

Le gras d'un poulet

mangea au brouet

Pont et Verberie.

Le bec d'un petit coq

emportait sans procès

toute la Normandie

et une pomme pourrie

qui a frappé d'un maillet

Paris Rome et la Syrie

en a fait une gibelotte :

personne n'en mange sans rire

(Beaumanoir, t. II, p. 306-307.)


[Publicado en La Révolution Surréaliste, nº 6 – Deuxième année. 1er Mars 1926]